LE SEXE SELON MAÏA
A l’occasion de la Saint-Valentin, nous apprenions que 22 % des Françaises avaient déjà introduit un doigt dans l’anus de leur partenaire : une pratique occasionnelle pour 9 % d’entre elles, régulière pour 2 % (chiffres Elle/IFOP, 2019). La banalisation est encore loin, mais si la fellation, le cunnilingus et la sodomie sont progressivement entrés dans le répertoire sexuel, ce tabou-là pourrait être le prochain à tomber.
Le massage prostatique, donc : une expression évoquant plutôt le pragmatisme médical que la transcendance orgasmique. Et pourtant. Non seulement la stimulation de la prostate provoque ce que certains hommes appellent des « super orgasmes » (plus longs, plus intenses, ressentis dans tout le corps), mais elle remet de la sensualité et de l’intériorité dans une sexualité masculine hétérosexuelle souvent phallocentrée.
Car admettons-le : à force de n’utiliser qu’un seul organe, on se limite. On tourne en rond. On s’ennuie. En moins de temps qu’il n’en faut pour l’écrire, on quitte femme et enfants pour devenir microbrasseur ou champion de Tetris.
Puisque nous parlions de médicalisation, un peu d’anatomie : la prostate est une glande appartenant au système génital masculin. Outre ses fonctions physiologiques (elle produit une partie du liquide séminal), sa stimulation est érogène – d’où son surnom de « point P », en comparaison avec le « point G » des femmes. Pour peu qu’on accepte de se prêter au jeu, le corps révèle ici un incroyable potentiel de plaisir.
Forcément, ça intimide
Malheureusement, cette disponibilité physique entre en conflit avec certaines attentes sociales : un homme, ça pénètre, et si ça pénètre, ça n’est pas pénétré, sous peine de voir le pénis tomber en poussière (on ne va quand même pas s’autoriser le fromage et le dessert). (Petite remarque en passant : les orgasmes « normaux » provoquent des contractions de la prostate – du coup, réticents ou non, tous les hommes jouissent avec leur prostate.)
Cependant, pas de manichéisme : dans un cadre hétérosexuel, certains blocages viennent des femmes. La pénétration active les confronte à des problèmes auxquels elles ont pu échapper durant toute leur trajectoire sexuelle : mal faire, faire mal, prendre les devants, prendre des responsabilités. Forcément, ça intimide. Sans parler du manque d’acceptabilité, des éventuels dégoûts, d’une culture « potache » qui rappelle constamment à l’ordre, des réactions parfois agressives que suscitent ces pratiques. Reste aussi la question du comment : les techniques de pénétration des hommes sont peu transmises (rassurez-vous : ça n’est pas plus compliqué qu’une masturbation ou qu’un rapport vaginal).
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