Burgundy School of Business - création de la cuvée BSB 2020

Cuvée BSB 2020

TOUTES LES ETAPES DE LA CREATION DE LA PREMIERE CUVEE BSB

ETAPE n°12

ÉTIQUETAGE

Dernière étape avant d’envoyer les bouteilles ! On y est presque ! La cuvée Armand Heitz x BSB va bientôt être révélée.  

C’est parti pour l’étiquetage

C’est la finalisation d’une année de travail pour cette cuvée et mon cœur balance entre excitation et stress du rendu final !  

Ici, mais comme chez beaucoup de vignerons, c’est au dernier moment que l’on étiquette les bouteilles. Cela permet d’envoyer des bouteilles avec des étiquettes en bon état : non tachées par l’humidité ni la poussière. Ainsi, on peut adapter l’étiquette jusqu’au dernier moment : les normes législatives sont différentes en fonction du pays d’envoi, et les informations nécessaires sur l’étiquette au dos de la bouteille (appelée la contre-étiquette) peuvent varier. 

La cuvée, que l’on a mis en bouteille un mois plus tôt, nous attend donc au stockage avec l’ensemble des bouteilles du domaine.  

Lorsque j’arrive au stockage, c’est Estelle qui m’attend et qui va passer l’après-midi avec moi. C’est elle qui prépare les commandes du domaine depuis quelques mois.  

Ce lieu est impressionnant par sa taille !

On y trouve plusieurs quais de livraisons et une petite porte au nom de Armand Heitz. A l’intérieur je découvre l’ensemble des bouteilles stockées avant envoi. Les box sont empilées sur trois, parfois même quatre étages. Il ne faudrait pas en renverser un !  

On commence par l’impression.

Ayant des formats d’étiquettes différents pour chaque format de bouteille, le domaine a sa propre imprimante et imprime les étiquettes en fonction de chaque commande. Ça permet d’être plus flexible et surtout ça permet à Astrid de faire des tests lorsqu’elle crée les designs des étiquettes.  

D’ailleurs, c’est maintenant que nous allons découvrir le rendu final de notre étiquette. De voir “en vrai” le design que l’on a validé.  Grand moment !  

Un détail sur lequel j’aimerais attirer votre attention : 

Chaque bouteille est numérotée.  Ce qui rend chaque bouteille unique ! 

Une fois nos 300 étiquettes et contre-étiquettes imprimées, on commence à les mettre en place sur la machine. C’est un montage assez minutieux qui me fait penser à la préparation du fil dans une machine à coudre. On règle chaque petit détail et on remplit également les capsules – coiffée de la Marianne. 

La Marianne ? Pour les non-initiés, c’est tout simplement une taxe, un droit de consommation sur l’alcool que le producteur paye aux douanes (DGDDI).  

Au cours de cet après-midi, on a passé beaucoup de temps à essuyer chaque bouteille. Lorsque l’on réalise la mise en bouteille avec un camion, on n’a pas ce problème.  Mais rappelez-vous : on a utilisé une chèvre pour mettre en bouteille en cave et malheureusement les bouteilles sont sales. Si c’était à refaire, un simple carton au sol nous aurait économisé une bonne heure lors de l’étiquetage !

Finalement on prend conscience qu’une petite erreur ou un petit oubli lors d’une étape antérieure peut avoir de lourdes conséquences lors de l’étiquetage.  

Une fois quelques bouteilles étiquetées, place au pliage des cartons !  

Chez Armand, pas de scotch ! Les cartons sont conçus pour être pliés entièrement et se ferment de la même manière. Le pliage est assez intuitif, il faut juste faire attention à ne pas se couper ! 

Les cartons sont également étudiés pour être le plus ergonomiques possible : les bouteilles sont un peu en biais à l’intérieur du carton et cela permet de gagner de la place : moins de surface = moins de poids mais aussi plus de cartons par palette.

Le domaine va jusqu’au bout de ses valeurs et essaye ainsi de réduire son impact carbone !

Encore une fois, ça me conforte dans l’idée que ce n’est pas du greenwashing mais bien l’application des valeurs du domaine.  

Dernier point important : empiler les cartons sur la palette ! Cela peut semblait anodin mais c’est vraiment un pli à prendre. L’idée c’est que la place soit optimisée et que la palette soit jolie. Bien sûr, on met une étiquette de la cuvée sur chaque carton, pour que l’on sache quel vin est à l’intérieur.  

L’étiquetage, et de manière plus générale le stockage et la logistique, sont des étapes essentielles pour que la commercialisation du vin se passe correctement ! Même si tout est bien réalisé en amont, le travail de vinification, de marketing ou encore de vente par exemple, s’il y a un problème au niveau de la logistique c’est toute la réputation du domaine qui est impactée : étiquettes mal posées, erreur dans la livraison, délai de livraison trop long.

Réaliser cette étape avec Estelle m’a fait prendre conscience des enjeux et de l’importance de ce poste que l’on a tendance à oublier.  

La palette est prête à être envoyée, maintenant il n’y a plus qu’à déguster 😉 

Cette première cuvée étant un événement pour la School of Wine & Spirits Business, toutes les bouteilles – ou presque – sont réservées à l’école.  Tout le monde ne pourra donc pas y goûter, mais j’espère qu’elle sera à la hauteur des attentes de tous ceux qui auront cette chance ! 

photographies © Marie Marc

ETAPE n°11

EMBOUTEILLAGE

Aujourd’hui c’est le grand jour !

On met en bouteille avec une chèvre !  

Une chèvre ?  Je ne savais pas que ça s’appelait comme ça, mais c’est bien l’outil que l’on emboite sur le fût pour mettre en bouteille manuellement !  

Cette technique est très peu utilisée aujourd’hui car c’est plus cher et moins rapide que de mettre en bouteille de façon “industrielle” avec un camion par exemple ou alors avec sa propre chaine de mise en bouteille.
Chez Armand, habituellement c’est un camion qui vient pour la mise et ils s’organisent pour avoir plusieurs cuvées à mettre en bouteille à la même période. Plus de 2000 cols à l’heure !  

Quand on utilise une chèvre c’est un peu différent ! 

On remplit chaque bouteille à la main (depuis le fût) puis on fait le niveau de manière très précise – on ajuste chaque bouteille à la pipette car le nombre exact de cl que l’on met dans la bouteille varie en fonction de la température du vin au moment de la mise. 

Enfin on met un bouchon, à la boucheuse (ancienne également). 

Heureusement que je ne suis pas venue seule au domaine cette fois ci ! 

Adrien, étudiant du MS CIVS, et Jason, du MBA, avaient participé à la sélection en ligne d’Armand au début du projet. Mais sans rancune, ils sont ravis de m’accompagner pour cette étape clé.  

“J’ai suivi attentivement le travail mené par Armand Heitz et ses équipes ainsi que Marie et sur cette cuvée spéciale. Quand l’occasion s’est présentée de pouvoir participer à cette étape de mise en bouteilles, je n’ai donc pas hésité.”

Adrien

Arrivés à 8h au domaine – il fait très froid.  

On commence par récupérer des caisses de vendanges et les remplir avec des bouteilles vides. 
On estime qu’on devrait pouvoir remplir environ 300 bouteilles. Ou plutôt 280 car il y a de grandes chances que les 20 dernières bouteilles soient remplies de lies – les levures mortes qui tombent au fond du fût -. 
Elles ont une texture visqueuse et sont souvent très amères, croyez-moi vous n’avez pas envie d’en retrouver dans votre bouteille !     

Après avoir descendu l’ensemble des bouteilles dans la cave, François nous montre chaque étape : il installe la chèvre (ça ressemble à un robinet avec deux sorties) – puis nous montre comment s’en servir.
On ajuste le niveau de vin à l’aide de la pipette et il nous montre comment utiliser la boucheuse manuelle à pied.  

Avant de commencer – place à la dégustation

“On ne met pas en bouteille un mauvais vin”

Armand

Prêts ? Chacun à son poste ! Et nous voilà parti pour 3h d’embouteillage. 

On prend notre travail très au sérieux et chacun est très concentré pour ne pas faire d’erreurs ! Dès que l’on a compris les mouvements – l’ambiance se détend et on rigole beaucoup tout en travaillant.  

Petit plus dans cette expérience : on change de poste toutes les 30, 40 minutes pour ne pas trop se fatiguer et surtout, pour pouvoir réaliser chaque étape.  

3h pour embouteiller 300 bouteilles à 4 personnes…vous imaginez bien que cette mise n’est pas rentable !  
C’est pour ça que très peu de domaine en Bourgogne réalise cela à la main. De plus, le vin est beaucoup plus longtemps en contact avec l’air et il y a un plus gros risque d’oxydation. On aurait pu choisir d’ajouter un peu de souffre pour éviter un maximum ce risque mais ce n’est pas la philosophie de notre cuvée “nature” (ou plutôt avec le moins d’intrants possible) et on décide de ne pas en ajouter.

On verra lors de la dégustation si on a fait le bon choix. 

A la fin du tirage, Mathieu – le nouveau directeur technique adjoint du domaine – nous explique comment détecter le moment où il y a trop de lies dans le vin : grâce à un tastevin ou encore grâce à la lumière à travers un verre. Nous regardons la turbidité – si le vin en contient trop (qu’il est trop trouble) c’est qu’il y a des lies à l’intérieur et il vaut mieux arrêter de tirer du vin. 
On vérifie très souvent à partir de la 250ème bouteille.  Mais finalement, la turbidité arrive à la toute fin et il y a très peu de lies dans le fond du fût. C’est “signe d’un travail bien fait tout au long de la vinification” selon Mathieu.  

Curieux, on se risque à gouter les lies – ça ne donne pas très envie mais c’est intéressant : une certaine amertume mais aussi une longueur en bouche ! Pour ce qui est de la texture c’est plutôt visqueux et vraiment pas très ragoutant.  

Après un repas bien mérité, préparé par le chef du domaine (oui, il y a un vrai chef au Domaine 😊), on aide au rangement et au lavage du fût !
C’est plutôt impressionnant : une buse à l’intérieur du fût envoie de l’eau chaude à haute pression pour décoller toutes les particules. En quelques minutes de l’eau claire en ressort alors qu’elle était vraiment rouge foncé à la base.   

On finit la journée en allant visiter Loaris avec Jason et Adrien.  Les tulipes sont de sortie, c’est vraiment très joli !  

“Cette journée était riche et m’a permis d’appréhender le process de mise en bouteille sur une quantité plus confidentielle et dans un esprit plus traditionnel.
Les échanges avec les équipes d’Armand sur leur travail quotidien au domaine ainsi que la très bonne ambiance auront rendu ce moment apprenant et ludique. 
Bien évidemment j’ai également bénéficié d’une dégustation en avant-première et je suis certain que vous apprécierez le fruit du travail réalisé par Armand et Marie sur cette cuvée !” 

Adrien

photographies Jib Peter – © armandheitz

ETAPE n°10

DEGUSTATION

Afin de vérifier l’évolution de l’élevage, Armand déguste la cuvée régulièrement. C’est un des avantages d’habiter sur le domaine.

Je ne vous parle pas ici des vaches que vous pouvez voir sur les réseaux sociaux d’Armand – mais bien de l’élevage d’un vin : l’étape entre la fin de la fermentation et la mise en bouteille.  

Cette période est importante puisque le fût va contribuer à assouplir les tannins, à donner de la structure et parfois quelques arômes de bois en fonction du fût choisi.  

J’ai pu moi aussi aller quelques fois au domaine pour déguster et suivre l’évolution du vin.  

Mi-mars, dernière dégustation. Les tannins s’assouplissent et les fruits sont toujours présents. Le vin se complexifie et malgré son fort degré alcoolique, reste très agréable.  

Dans le Beaujolais, d’après la définition de l’AOC les vins doivent être supérieurs à 10 degrés alcooliques (ce qui n’est pas un problème pour notre cuvée) et ne peuvent dépasser 13 degrés s’il y a chaptalisation (c’est à dire si l’on ajoute du sucre avant la fermentation pour que le vin soit plus élevé en alcool), ce qui n’est pas non plus notre cas.  

Pour notre cuvée, nous sommes aux alentours de 14,5 – 15, ce qui est plutôt élevé pour le Beaujolais. Mais comme je vous le disais, ce taux élevé ne gâche en rien le goût du vin.  

Lors de cette visite, Armand m’annonce qu’il est heureux d’avoir travaillé avec moi, de ce qui est “ressorti” de ce projet, et qu’il aimerait renouveler la cuvée pour le millésime 2021.  

C’est une super nouvelle ! Je suis très contente qu’un(e) autre élève puisse vivre cette expérience à sa manière l’année prochaine.  
Cela sous-entend également la pérennisation du partenariat avec l’école ! Quand deux organisations partageant des valeurs peuvent se réunir autour de projets si intéressants, ça fait sens.  

J’ai hâte de suivre les aventures du (ou de la) prochain(e) chanceux(se) !  

Mais revenons à cette première cuvée. Qui n’a pas encore de nom ! 

A travers le travail sur cette cuvée, l’objectif d’Armand est de transmettre aux jeunes, de leur apporter son savoir, de partager des valeurs et de faire perdurer des gestes utilisés par les anciens. Il en retire également un nouveau regard et de nouvelles idées. C’est plus qu’une expérience, c’est un partenariat qui permet des échanges et grâce auquel chacun évolue.  

Cette idée de transmission, nous souhaitons tous les deux la conserver et l’utiliser pour définir notre cuvée.  

Nous cherchons donc un nom qui ait un lien très fort avec la notion de transmission – de savoir, de connaissance et de lien social. Mais qui soit aussi fortement évocateur de nos origines, de notre histoire. Un nom qui puisse perdurer pour les prochaines cuvées. Un nom qui traduise le concept même de l’expérience que j’ai la chance de vivre et que d’autres pourront également vivre.  

Nous avons trouvé ! A la fois poétique, inspirant et évocateur !

Mais je ne vous en dirai pas plus pour le moment, je préfère vous laisser imaginer comment – vous – vous traduiriez toute la complexité de cette cuvée…

Un indice ? Aristote et Michel Foucault nous ont inspirés.  

Si vous êtes curieux, vous aurez déjà identifié qu’Armand Heitz propose aujourd’hui deux “gammes” de vin, graphiquement très différentes.
Comme notre cuvée a sa propre histoire, elle fait partie des “vins qui cassent les codes” : un peu comme Connivence, Blanc de Blanc ou encore Folie Sauvage. Elle s’inscrira donc graphiquement dans cette gamme de produit et Astrid réalisera une aquarelle à l’encre de Chine pour illustrer la cuvée.  

Là non plus, je ne vous en dis pas plus pour le moment et je laisse libre cours à votre imagination. J’espère cependant que l’idée vous plait.  

photographies Jib Peter – © armandheitz

ETAPE n°9

L’ENTONNAGE (choix du fût)

L’entonnage c’est le fait de mettre le vin en fût.
Il faut alors choisir le type de fût et cette étape est directement liée à la dégustation de la cuvée.

Avant même de pouvoir y réfléchir sérieusement, il faut s’assurer que la fermentation est finie. Et cette fermentation, vous avez pu le lire, ne s’est pas passée exactement comme on l’aurait espéré. 

Ça a été long et assez stressant.  

Et pour finir la série de complications, l’automne est arrivé ! Un choc de température a stoppé la fermentation alors qu’il restait du sucre dans notre cuve.  

En Bourgogne et dans le Beaujolais, le taux de sucre résiduel autorisé dans le vin rouge est inférieur à 2g/L. Il faut donc à tout prix descendre en dessous de cette barre si l’on veut pouvoir commercialiser le vin en gardant l’appellation.  
Au-delà de cette règle, la fermentation n’étant pas totalement achevée, il y a également un risque de développement de certaines bactéries qui peuvent rapidement faire dévier le vin et créer des arômes de défauts, que nous ne voulons surtout pas obtenir.  

Au début de la vinif nous ne voulions pas ajouter de levures afin de réaliser une vinification la plus “nature” possible. Mais nous n’avons finalement pas le choix, pour obtenir un vin stable, finir la fermentation et ne pas développer de défaut, on a besoin d’aider notre cuve. 

On finit donc par ensemencer notre milieu, c’est à dire ajouter des levures pour finir la fermentation.  

Grâce à cet ensemencement, on a pu finir la fermentation – même si c’est resté laborieux. François a dû réaliser trois analyses au laboratoire avant d’avoir enfin une réponse positive sur la quantité de sucre.  
Suite à cette réponse, je repars au domaine pour déguster avec Armand et parler de la suite de la cuvée. 

Allons nous passer le vin en fût ? Et si oui dans quel fût ? Quel type de vin souhaitons-nous et pouvons-nous réellement réaliser ?  

Au début du projet, on était parti sur un vin très “sur le fruit”, pas très complexe et qui se boirait facilement.
Mais plus on y pense, moins ça nous attire. En effet, la date du Beaujolais Nouveau passée, ni Armand ni moi n’avons envie de réaliser un vin que l’on pourrait définir de “facile”.  On préfèrerait donc se tourner vers un vin avec un peu plus de caractère.  

Et nous avons une jolie surprise en dégustant le vin ! 

Malgré la fraicheur de la cuverie, on a une joli palette aromatique portée sur les fruits frais – de la framboise, de la violette -, des tannins vifs qui auront besoin de s’assouplir.  

François propose de mettre notre vin dans un fût qui a été utilisé pour la vinification de vins blancs plutôt que rouges. Cela devrait lui donner un caractère atypique en comparaison à d’autres vins rouges car le fumé du bois est différent et moins prononcé.  
Nous nous accordons sur cette idée. 

Mais cette fois encore, tout ne se passe pas comme prévu ! Il y a une coupure d’eau au domaine !

Et même si on a déjà installé tous les tuyaux et la pompe, l’entonnage, ce ne sera pas pour aujourd’hui ! Je rentre chez moi et François entonnera dans quelques jours, mais sans moi.  

photographies © armandheitz – MarieMarc – Philippe Bruchot – Romarine

ETAPE n°8

LE DECUVAGE

La fermentation s’est lancée ça y est !

Le sucre diminue, l’alcool augmente, tout se passe comme prévu. On réalise quelques remontages (toujours au sceau) et on surveille de près la cuve (plusieurs densités température par jour, François revient travailler le week-end pour être sûr que tout se passe bien). 

Pour notre cuvée, on travaille avec un petit volume puisque l’objectif est de produire un fût bourguignon
(vous vous rappelez ? 228 litres)

Vous pourriez vous dire : petit volume = plus de facilité à vinifier ! 
Pas du tout en fait !

Un petit volume à vinifier représente en réalité plus de surveillance et d’attention à chaque étape car chaque écart de température peut être fatal pour les levures.
Or on a besoin de ces levures pour finir la fermentation.
Et comme le milieu est moins chargé, il faut absolument les protéger !  

Prochaine étape : le décuvage.

On enlève les marcs. Les marcs, ce sont tous les résidus : peau, rafles, pépins, que l’on ne veut pas trouver dans le vin. En les enlevant, on fixe la couleur : on stoppe l’extraction de la couleur et des tannins. 
Ça fait maintenant 3 semaines que l’on a vendangé, il reste du sucre dans la cuve mais on décide de décuver afin d’enlever les marcs car on est satisfait de ces deux paramètres. 

Encore une fois il faut accepter de mettre “la main à la pâte” et de se salir un peu. 

Le travail de décuvage est très physique et pendant les vinifications il peut y avoir plusieurs cuves à décuver dans la même journée.

Dans les grosses cuves, il faut entrer totalement et pousser les rafles, peau (tout ça encore chargé de jus) par la petite porte grâce à une pelle ou une fourche afin que cela monte dans un gros bac – grâce à une vis sans fin – qui est ensuite versé dans le pressoir. 

Pendant mes deux semaines chez Armand j’ai eu l’occasion de décuver plusieurs cuves moi-même. 

Imaginez mes jambes à chaque fois que sors de là : violettes jusqu’aux genoux ! Et pour les bras, pas besoin d’aller pousser à la salle, la fourche suffit pour développer mes biscotos ! 

Après avoir décuvé, ce n’est pas fini !
On passe au lavage des pressoirs pneumatiques, au Karcher et ça non seulement à l’extérieur du pressoir mais également à l’intérieur.


C’est rare de finir cette étape sans être trempée. Heureusement l’automne débute seulement et il fait encore bien chaud au soleil. 

On décuve aussi notre cuvée.

On a d’abord laissé écouler le jus de goutte 
(c’est le jus qui s’écoule directement de la cuve), 

puis je suis allée à l’intérieur de la cuve et je l’ai vidée au sceau
(puisqu’il n’y a pas de porte au bas de la cuve). 

Le jus que l’on extrait du pressoir s’appelle le jus de presse ! 

On remet ensuite jus de goutte et jus de presse dans la cuve,
et ça repart en cuve jusqu’à ce que le milieu soit “sec” comme on dit ici
(qu’il n’y ait plus de sucre dans la cuve). 

En espérant que la fermentation se finisse rapidement !  

C’est très différent d’un décuvage de grosse cuve mais tout aussi physique finalement !

Et ça fait du bien de voir l’avancée du projet avant de repartir à l’école ! 

  

photographies © armandheitz – Marie Marc

ETAPE n°7

LA PAULEE

Au domaine, on travaille, mais on sait également profiter et faire la fête !  

Pour ceux qui ne connaissent pas la Paulée : c’est la fête de fin de vendanges !

Les vendanges représentent une grosse période de stress et de travail dans un domaine, dès que tous les raisins sont rentrés, c’est la tradition de célébrer avec toutes les personnes qui y ont participé ! 
Chaque région a son petit nom : chez nous en Bourgogne, c’est la Paulée, chez les Bordelais on parle de la Gerbaude, alors que c’est le Cochelet en Champagne.  

Tout le monde participe : l’idée c’est de prendre autant de plaisir à préparer qu’à faire la fête  

Chez Armand, l’organisation se fait en équipe et chaque team a sa mission. 

Parfois on travaille avec des personnes sans vraiment les connaitre – moi par exemple qui ai rejoint l’équipe récemment je connais principalement les personnes avec qui j’ai eu l’occasion de travailler. 
Ce moment permet de se rencontrer, d’échanger ses points de vue, de rigoler ensemble…et de découvrir nos collègues sous un nouvel angle.

En bref, c’est super chouette et convivial !  

Herbes fraîches du jardin

Je fais partie de la team cuisine. Au programme : préparation des différentes marinades et des salades, et également de l’apéritif. Mais pas n’importe comment ! 
Pour les marinades, on choisit les herbes aromatiques qui nous plaisent dans le jardin d’Armand. Et pour les légumes, ils sont tous droits venus de Loaris : des beaux légumes du jardin ! 
Ça met l’eau à la bouche, non ?  

Tables et bancs installés dans la cour du domaine, tout le monde est assis et un silence règne. Que se passe-t-il ?  

Armand est au micro et donne quelques chiffres sur le résultat des vendanges et les futurs objectifs de l’entreprise.  Petite présentation de la famille : la tata d’Armand qui connait toutes les anciennes têtes fait le tour de chacun d’entre nous et rencontre les “nouveaux” (dont je fais partie).  

La soirée peut commencer ! 

pommard-clos-des-poutures

Quelles bouteilles !
C’est l’occasion de gouter à de petites merveilles du domaine : Pommard 1er Cru Clos des Poutures 2014 et 2015, Meursault 1er Cru les Gruyaches,  Meursault 1er Cru les Perrières…  
Je profite et découvre en même temps le caractère des vins du domaine.  

Le vin, c’est important (avec modération) mais la nourriture aussi. L’apéro débute avec les gougères faites maison, puis encornets, côtes de bœufs, légumes, fromage !
Que de bons produits !  

On continue la soirée en dansant jusqu’au bout de la nuit : un ami d’Armand a installé les platines et mixe dans la cour du domaine.  

On réussit presque à oublier la Covid le temps d’une soirée, ou encore que le réveil sonnera dans quelques heures pour prendre les densités températures des cuves et continuer les vinifications…  

Cette Paulée est vraiment à l’image de tout ce que je vis au domaine : un mélange de convivialité, partage et amour des bonnes choses.  

photographies © armandheitz – Dijon-Beaune-Mag

ETAPE n°6

LOARIS

Difficile d’écrire sur mon expérience chez Armand Heitz sans vous parler des valeurs du domaine.  

Vous l’avez compris maintenant : Armand accorde beaucoup d’importance à la Nature. Il cherche à la comprendre et essaye de la protéger, notamment en développant une biodiversité au cœur du vignoble. 

Il a donc très vite essayé la biodynamie.
C’est tendance c’est vrai, mais pas suffisant selon Armand en termes de développement des sols !

Bien que ce soit une culture “respectueuse de l’environnement” : en lien avec la terre et les astres, elle amène trop peu de vie dans le sol. Déçu, il a décidé de chercher comment créer plus de diversité.

Il s’est alors intéressé à la permaculture.  

Si vous n’en avez jamais entendu parler ou si vous êtes curieux d’en savoir plus, je vous conseille d’aller faire un tour sur “Les Carnets d’Armand” .
Vous y apprendrez beaucoup!  

Le principe, c’est de permettre aux plantes de s’aider entre elles.
Par exemple : planter des engrais verts (petits pois, fèves, févroles,..) dans les vignes pour qu’il y ait une compétition naturelle avec l’herbe et éviter de mettre des herbicides ou encore de labourer.  

Pas du genre à faire les choses à moitié, Armand a investi dans un jardin expérimental pour réaliser des tests grandeur nature sur le fonctionnement de la permaculture :
LOARIS – 1 hectare entre Chassagne et Meursault –

Ce lieu c’est comme un petit paradis au cœur des vignes où l’on trouve des poules, des oies, une mare mais également un jardin en forme de mandala.

Cette forme était déjà utilisée pour les cultures par les civilisations pré-incas.  

Rien n’est laissé au hasard.

En permaculture, l’idée est de trouver le bon équilibre. Celui qui permet aux plantes de se protéger entre elles, de partager “équitablement” les éléments dont elles ont besoin et se fournir se dont elles pourraient manquer.

Ça permet également de cultiver beaucoup plus de variétés dans un petit espace. 

Loaris, c’est tellement important pour le domaine, que j’ai visité le jardin dès le premier jour. 

Nous sommes partis avec Fabrice, le responsable marketing, et dès notre arrivée on était plongée au cœur de la nature.
Les poules qui gambadaient dans le jardin nous ont accueillis ! 
Certains fruits et légumes étaient encore en train de murir : tomates, courgettes, potirons, …  

Au cœur de la route des vins, difficile d’imaginer qu’entouré de quelques arbres se cache un tel écosystème!

Loaris c’est un jardin expérimental, mais ça va plus loin que ça !  

Pas question de cloisonner, c’est une partie à part entière du domaine et c’est super intéressant pour de très nombreuses raisons. Par exemple : tous les déchets verts du domaine sont réutilisés pour fabriquer du compost.  Même les déchets personnels de Fabrice (il va à Loaris toutes les semaines !), ça fait moins de poubelles et plus de compost. 

C’est aussi le développement du marché ultra-local :
les fruits et légumes produits sont revendus au restaurant de Chassagne. En bonus : le surplus est offert aux employés : œufs frais, fruits, légumes…

De quoi cuisiner de bons petits plats à accorder avec les vins du domaine ! 

photographies © armandheitz – Jib Peter

ETAPE n°5

LA FERMENTATION – et ses aléas

La nature est parfois capricieuse et avec le type de vinification que nous avons choisi, nous devons en accepter les aléas.
C’est assez déroutant de ne pas pouvoir tout contrôler et d’accepter une part de “hasard”.  

Notre cuvée représente un petit volume, après pressurage nous espérons obtenir l’équivalent d’une pièce bourguignonne (228 litres).  
Le problème du petit volume – et nous n’avions pas anticipé cela – c’est que les raisins (non érraflés) ne sont pas assez lourds pour ouvrir les baies du fond de la cuve et laisser un peu de jus en sortir afin de commencer la fermentation.

Alors que les grosses cuves de Beaujolais, vendangées le même jour, sont en pleine fermentation,

notre cuve prend son temps et ne montre pas encore de signe de fermentation.

Mais quels sont ces signes et comment surveiller l’évolution d’une fermentation ?  

Ces questions, ce sont celles qui préoccupent le responsable de cave, François donc, mais aussi de toute l’équipe de la cuverie pendant la période des vinifications.  

Au début du projet, j’ai eu la chance de travailler pendant deux semaines chez Armand et faire partie de cette équipe.

Chaque jour nous suivons à la lettre les prescriptions de François en vérifiant “densité – température” sur chaque cuve afin de savoir si la cuve est en fermentation et quelle quantité de sucre doit encore être transformée en alcool.

Concrètement, nous prélevons un échantillon de moût – le moût, c’est le nom que l’on donne au jus de raisin non fermenté – afin de regarder sa densité et sa température. Ces deux données nous permettent de savoir où en est la fermentation alcoolique (puisque la conversion du sucre en alcool diminue la densité du moût qui se transforme en vin).  

Lorsqu’il a les résultats, François nous demande parfois de réaliser des remontages : pomper le jus du fond pour l’asperger au-dessus du chapeau. Cela permet d’ajouter de l’air au vin en fermentation et de nourrir les levures qui en ont besoin pour continuer la fermentation. Mais cela permet aussi d’extraire de la couleur et des tannins lorsque le vin n’est pas encore pressé (lorsqu’il reste de la peau et les rafles).  

Sur d’autres cuves, on réalise un pigeage : c’est à dire descendre l’ensemble du chapeau qui est en train de sécher dans le jus : cette étape reste traditionnelle chez Armand : on se rince les pieds et on piétine les cuves. C’est une étape que j’apprécie beaucoup mais il faut rester vigilant au gaz qui se dégage de la cuve: sous notre poids le gaz carbonique remonte et ce dernier est incolore, inodore mais malheureusement mortel.  

Après plusieurs jours d’attente et de questionnement, nous décidons d’aider notre cuve et de réaliser deux remontages par jour (au sceau car il y a trop peu de jus pour le réaliser avec une pompe). Cela devrait permettre de lancer la fermentation dans l’ensemble de la cuve.  

Malgré cela, la densité bouge très peu…On passe au pigeage.

J’enlève mes chaussures, mes chaussettes et je pige la cuve !

Juste quelques minutes suffisent pour extraire du jus et aider au lancement de la fermentation.

Pour plus d’efficacité, on laisse la cuve quelques heures au soleil. En cette troisième semaine de septembre, les nuits rafraichissent fortement, ce qui ne favorise pas les levures et leur action.

Un peu de chaleur devrait aider les levures !

photographies © armandheitz et Marie Marc

ETAPE n°4

LA VINIFICATION – 1

Lorsque l’on réalise un vin rouge, différentes options de vinifications s’offrent à nous : type de macération, utilisation ou non de levures sélectionnées, pigeage, remontage…

Mise en cuve de la cuvée BSB avec Marie

Première étape et première question à se poser : que fait-on avec les grappes ? 
Est-ce que l’on garde les rafles (la partie végétale qui tient les baies entre elles) ou est-ce que l’on érafle (égrappe) ? Souvent un vigneron érafle les grappes destinées à donner des vins rouges pour n’avoir aucun risque de notes végétales, herbacées ou amères que pourraient apporter des rafles pas assez mûres lors de la macération.
Pour nous, peu de risques ! Les raisins sont bien mûrs, les rafles aussi et avec Armand nous jugeons que “les garder va nous permettre de gagner en structure, en fraicheur et en complexité”. On décide donc de ne pas érafler et de mettre directement les raisins dans la cuve. 

Et c’est parti pour la macération !  

Mais qu’est-ce que la macération ? 
Une étape essentielle dans la création d’un vin rouge puisque c’est cette étape qui va déterminer la puissance de la couleur, ça va également impacter le développement des arômes et la quantité de tannins.  

Une des premières choses que l’on apprend quand on s’intéresse au processus de fabrication des vins, mais toujours une surprise pour qui l’apprend, le jus d’un raisin noir est transparent 😊 C’est la peau qui donne sa couleur au vin (molécule anthocyanes = pigment naturel présent dans la peau).  

Il est donc tout à fait possible de faire du vin blanc à partir de raisin noir.

Des exemples? le blanc de noir réalisé en champagne (Champagne uniquement issu de Pinot Meunier ou de Pinot Noir) ou encore le blanc de Noir d’Armand, qui est un vin blanc issu de 100% Pinot Noir.  

Mais revenons au rouge. Plus on va laisser macérer un raisin noir longtemps plus on va extraire des pigments et donc de la couleur mais également des tannins.  

Il y a différents types de macération. Avec Armand, nous souhaitons réaliser une macération semi-carbonique. C’est la macération spécifique du Beaujolais, on n’ajoute pas de gaz carbonique ni de levure. Normalement, la fermentation commence naturellement dans le jus de raisin qui se trouve au fond de la cuve. 

Nous avons donc mis l’ensemble des grappes (avec les rafles) dans une cuve. Nous posons le chapeau sur la cuve, en attendant que la fermentation commence et le gaz carbonique créé remplit la cuve et permet de rendre le milieu anaérobique (ainsi les saveurs qui se développent sont conservées et non oxydées par l’air).  

La seconde question à se poser porte sur la fermentation : quelles levures va-t-on utiliser pour lancer la fermentation alcoolique ?  

Petit rappel : il y a deux fermentations qui apparaissent dans la création d’un vin : la fermentation alcoolique et la fermentation malo-lactique.
La première permet de transformer les sucres en alcool et la seconde l’acide malique en acide lactique qui est un acide moins agressif. Les deux fermentations sont réalisées grâce à des levures.  

Cette année Armand et François voulaient vinifier l’ensemble des cuvées en levures indigènes, c’est à dire sans ajouter de levures présélectionnées par un laboratoire mais en laissant agir celles qui sont naturellement présentes sur la peau des raisins. Malheureusement l’année un peu particulière (vendanges très précoces) ne leur ont pas permis de réaliser ce projet. Lorsque je suis arrivée au domaine, certains vins étaient en cours de vinification et ils avaient utilisé des levures pré-sélectionnées. Lorsque l’on utilise ces levures pour lancer la fermentation, cela évite bien des désagréments, je vous expliquerai cela lors d’un prochain article.  

Pour ma part, mon papa réalise son vin de table dans les Vosges de manière plus que naturelle (aucun ajout de levures, souffres, sulfites), je me suis dit que ce serait chouette de réaliser un vin comme lui, le plus naturel possible. 

 Afin de mettre un pied dans le projet d’Armand finalement repoussé (ensemble des vinifications en levures indigènes) et de me rapprocher de la vinification “naturelle” que je connaissais, nous avons choisi de réaliser une vinification en levures indigènes avec peu d’intervention, tout en nous laissant la possibilité d’intervenir si besoin en gardant en tête notre objectif final “obtenir un vin sur le fruit avec une légère complexité que l’on aura plaisir à partager entre amis”.  

A ce stade, il suffit donc d’attendre que la nature fasse son travail pour pouvoir suivre la fermentation.  

ETAPE n°3

LES VENDANGES

Top départ des vendanges, jeudi 10 septembre.
5h30 du matin au domaine, ça pique un peu ! 
Un petit café préparé par Astrid et hop ! direction le Beaujolais, et en camion svp 😊 
Astrid ? C’est la femme d’Armand.
Architecte de profession : c’est elle qui réalise les plans de la future cuverie.  

A notre arrivée à Prusilly, on a eu le droit à un lever de soleil et des couleurs magnifiques avec une vue sur le Mont Blanc. 
C’était époustouflant ! 

Armand m’avait raconté qu’il était immédiatement tombé sous le charme du domaine de la Combe Vineuse en 2018…j’ai compris pourquoi !

Le domaine est situé dans un petit village au cœur de l’appellation Juliènas, très, très, très calme.
C’est beaucoup plus petit que Chassagne, on se sent vraiment au cœur de la nature.

Après avoir fait les vendanges à Meursault, j’étais étonnée par les pieds de Gamay qui ne formaient pas la même structure qu’en Bourgogne.  
Armand m’a expliqué que le Gamay est cultivé différemment que le Pinot Noir. 

Les pieds sont taillés individuellement et il n’y a pas de palissage, c’est à dire pas de structure en bois ni de fils qui donnent l’impression de les relier entre eux. 
Dans le Beaujolais, on appelle ça la taille en gobelet.

Beaucoup moins pratique pour vendanger ! En effet les rangées sont moins visibles et il est plus facile d’oublier du raisin. 

Après avoir coupé quelques sceaux, j’ai surtout aidé pour charger les caisses sur le camion et distribuer les caisses aux porteurs. 
Les caisses qui sont utilisées pour les vendanges sont très caractéristiques. Il faut s’imaginer un système ingénieux (un côté rouge et un côté gris) avec une double utilisation qui permet d’emboiter les caisses lorsqu’elles sont vides (lorsque l’on pose le rouge sur le rouge et le gris sur le gris) et de les poser les unes sur les autres (quand on inverse les couleurs) quand elles sont pleines sans écraser les raisins. Il faut également faire très attention à ne pas laisser les caisses au soleil.
Les vignes étaient très pentues et il faisait très chaud ! On a fait plusieurs pauses pour que les vendangeurs puissent boire.

Écraser le moins possible le raisin pendant les vendanges c’est très important ! Le jus qui sort des baies va être en contact avec l’air et s’oxyder ! Il faut éviter cela un maximum.

On dit que l’importance de la communication est cruciale. Dans ce contexte, c’était flagrant.  

Toute l’équipe de vendangeurs était polonaise, y compris le chef qui lui non plus ne parlait ne parlais pas un mot de français. C’était parfois difficile de lui transmettre les informations. Au milieu de la journée on s’est rendu compte en essayant de communiquer qu’il parlait italien et qu’il comprenait assez bien l’espagnol, j’ai donc réussi à parler avec lui en espagnol pour donner les consignes à son équipe !

Quelle satisfaction d’avoir trouvé une langue pour communiquer, c’était quand même beaucoup plus rapide que les gestes !  

Le matin, avec Armand et Alexis, on a profité d’être dans le Beaujolais pour aller déguster les mouts en fermentations dans la cuverie de la Combe vineuse (Domaine d’Armand Heitz en Beaujolais).
C’était assez déroutant.
Lorsque l’on n’est pas habitué à l’exercice, c’est compliqué de s’imaginer à quoi va ressembler le vin une fois qu’il sera fini.  Par contre, c’est très intéressant et cela m’a permis d’anticiper les prochaines dégustations de notre cuvée :  si tout se passe bien, les dégustations de note cuvée devraient se rapprocher de ça d’ici quelques jours ou semaines.  

C’était aussi l’occasion de découvrir une cuverie typique du Beaujolais, avec uniquement des cuves en béton.  

Lorsque les camions sont pleins et que l’on rentre à Chassagne, la journée n’est pas finie !  Au domaine tout le monde s’active pour descendre les caisses des camions et les renverser dans les girafes afin que les raisins aillent dans les bonnes cuves.  

Pendant ce temps-là, notre cuvée aussi avance. 

Une palette de raisin avait été mise de côté pour que je sois là pour la mise en cuve 😊 
La récolte devrait permettre de produire 228 L, soit une pièce Bourguignonne (à ne pas confondre avec un tonneau Bordelais qui fait 225 L).

Et alors que fait-on avec ces raisins ? Egrappage ou pas ? Je vous parlerai des choix de vinifications lors du prochain article.    

photographies par Jib Peter – © armandheitz et Marie Marc

ETAPE n°2

LE CHOIX DU CEPAGE

Tout d’abord qu’est-ce qu’un cépage ?  

Pour certains, c’est évident.
Pour les autres – en deux mots – le cépage, c’est la variété de la vigne. Selon le cépage utilisé on obtiendra un vin différent : chaque cépage est différent et a sa spécificité en termes de couleurs, taux de sucre (et donc d’alcool), d’acidité ou encore de tannins. Mais n’allez pas croire qu’un même cépage donnera toujours le même vin !  

L’influence du terroir (climat, météo, sol), et du vigneron, est capitale !  

Comme vous le savez sûrement, on ne trouve pas tous les cépages dans toutes les régions. Chaque cépage réagit différemment en fonction de la température, des conditions météorologiques, du climat…et donc tous ne se plaisent pas aux mêmes endroits et c’est très bien : c’est aussi grâce à cela que tous les vins sont différents ! De plus certaines appellations n’autorisent que certains cépages. Par exemple en Bourgogne pour un blanc on ne peut trouver que du Chardonnay, de l’Aligoté et un tout petit peu de Sauvignon blanc (sur l’appellation Saint bris).  

La Cuvée aurait donc pu être faite à partir de Chardonnay : lors de ma candidature, j’ai répondu à un questionnaire : “quel cépage est votre cépage préféré ? Si vous deviez réaliser une cuvée que feriez-vous ? Quel serait le nom de la cuvée ?” J’ai proposé à l’époque un travail sur un cépage blanc : un chardonnay donc, car cela me semblait être le plus vraisemblable. A partir de ça, j’avais essayé de proposer quelque chose d’original et que j’aurais envie d’acheter et de boire. 

Mais chez Armand Heitz, on casse les codes ! Bien que l’on soit en Bourgogne, il est capable de réaliser des cuvées originales et un peu déroutantes comme son Blanc de Noir, c’est un blanc à base uniquement de Pinot Noir (raisin à peau rouge). C’est un vin très intéressant, qui sort des sentiers battus et à prix abordable !  

Conclusion : pas de Chardonnay pour cette cuvée !  
Mais quoi alors ?  

L’année 2020 est une année solaire et les vendanges, qui en Bourgogne ont généralement lieu mi-septembre, fin septembre, se sont déroulées fin août, début septembre. Lorsque je suis arrivée, une bonne partie des raisins étaient donc déjà vendangés. Pour ce projet, il était impensable de ne pas suivre le processus entier, des vendanges jusqu’à l’embouteillage. Parmi celles qui n’étaient pas encore vendangées, nous avons donc choisi une parcelle en Beaujolais, pour réaliser une cuvée à partir…de Gamay ! 

Connaissant très peu le Beaujolais, ma première pensée a été pour le Beaujolais nouveau – tout à fait cliché je vous l’accorde -. Je n’en avais pas une très bonne image. Mais essayer de réaliser un vin qui plaira aux jeunes, sur le fruit mais sortant des idées reçues sur le Beaujolais, faire découvrir un des crus du Beaujolais, me parait un super défi, que j’espère relever avec Armand !  

A la fin de notre discussion, le rendez-vous pour les vendanges était fixé. Et puisque j’étais encore un peu disponible avant la rentrée à SWSB, Armand m’a aussi proposé de venir travailler en cuverie. Super opportunité, j’ai tout de suite accepté !  

photographies par Jib Peter – © armandheitz

ETAPE n°1

LA RENCONTRE

4 septembre, deux jours après la nouvelle, je suis allée à Chassagne, rencontrer Armand et visiter le domaine.   

Chassagne Montrachet

Le domaine est situé au cœur de Chassagne. A l’entrée il n’y a ni grande devanture, ni signalétique imposante mais une petite grille qui pourrait faire croire que l’on arrive dans une maison. On entre dans un corps de ferme avec une cour au centre. Il y a les cuveries de part et d’autre de la cour et au centre la maison principale, celle d’Armand.  

François, le responsable technique du domaine, m’a accueillie et m’a directement expliqué ce qu’il réalisait sur une cuve. Du concret dès mon arrivée 😊 
C’est à ce moment-là que Armand est arrivé.  

Certains ont peut-être en tête le cliché du vigneron bourguignon : une personne renfrognée, solitaire et qui n’aime pas les touristes.  
Chez Armand Heitz, malgré le béret, on est loin des clichés ! 

Cette rencontre avait lieu en plein milieu des vendanges et vinifications, mais Armand a pris le temps de me faire visiter l’ensemble du domaine et de chercher à en savoir plus sur moi.  

On a beaucoup parlé, c’était passionnant et ce qui m’a marquée ce sont les deux valeurs d’Armand. Elles définissent le domaine, c’est criant dans la définition du projet.   

En 2013, le nom Heitz Lochardet est déjà connu puisque les parents d’Armand ont déjà réalisé du négoce. Le domaine a donc déjà sa clientèle même si les terres des parents d’Armand étaient en fermage (location des vignes à d’autres vignerons exploitants). 
Œnologue de formation, Armand reprend le domaine et entame une transformation de l’activité.  

Sa priorité, c’est la nature.

Il s’est donc concentré sur l’aspect agronomique et a naturellement d’abord travaillé ses vignes en biodynamie. Mais les résultats l’ont déçu et il a décidé de chercher d’autres recours (on en reparlera) afin de pérenniser la biodiversité et les sols.  

Il s’est ensuite demandé comment s’adresser à un public plus jeune et s’est intéressé aux aspects marketing de son métier. 
Le projet de la Cuvée que nous réalisons ensemble s’inscrit d’ailleurs dans la continuité du développement de sa marque produit.

Mais pas seulement.

La transmission est un aspect important du métier qui tient à cœur à Armand depuis la fin de ses études.

Ce projet est une jolie façon de le faire. Ce n’est pas la première d’ailleurs : pour l’anecdote, Armand a été prof, notamment à la “viti” à Beaune. (le lycée agri-viticole) 

Pendant nos échanges nous avons définis ensemble ce à quoi nous voulions arriver et comment nous devrions travailler pour s’en approcher : cépage, vinification, distribution….

Mais je vous expliquerai tout ça lors de prochains articles. 

ETAPE n°0

LE PROJET

Bonjour,

Je m’appelle Marie et je viens d’intégrer la School of Wine and Spirits Business (SWSB).

J’ai la chance d’avoir été sélectionnée pour un projet passionnant mis en place pour la première fois depuis la création de l’école : 

Je vais collaborer à la réalisation d’une cuvée ! 

Cela se passe dans le cadre d’un partenariat mis en place entre SWSB et un domaine bourguignon:  Armand Heitz.

L’objectif est de participer concrètement à la création d’une cuvée, pas seulement en tant qu’observatrice mais véritablement en tant qu’actrice.  

Les candidatures pour ce projet ont été lancées 3 semaines avant la rentrée. Je me suis tout de suite dit que ce serait une manière idéale d’apprendre davantage sur le processus de vinification et de vivre une nouvelle expérience dans le monde du vin. 
Mes premières recherches sur le domaine ont renforcé mon envie de candidater : plus je lisais à propos de Armand Heitz, plus je me retrouvais dans les valeurs qu’il semblait défendre.  

3 jours après, lors de ma dernière journée de vendanges dans un domaine en Bourgogne avec une amie, j’ai reçu un appel d’Armand, m’annonçant que je faisais partie de la short-list. Il m’a demandé de lui proposer un nouveau projet de vinification sur un cépage imposé.  

Le dimanche suivant – dimanche 2 septembre – il m’a appelé pour m’annoncer la bonne nouvelle ! Je ferai la cuvée avec lui ! 

Je suis très heureuse d’avoir été sélectionnée et j’ai bien l’intention de partager cette expérience. J’espère qu’à travers ce journal de bord, toutes les personnes intéressées par le projet pourront en apprendre autant que moi sur le travail en cave.

Photographies : Jib Peter – © armandheitz – Marie Marc